Co-animée avec l’écrivain et dramaturge de la nation Huron-Wendat Yves-Sioui Durand, cette session s’est déroulée différemment de la première à laquelle j’ai participée, intitulée « La langue de l’autre ». J’étais un peu intimidée parce que me trouvais en présence d’un artiste de très grande renommée. En tant qu’artiste émergente, je voulais découvrir ses méthodes artistiques qui lui ont assuré une belle, longue carrière pendant laquelle il a créé la première compagnie théâtrale professionnelle autochtone du Québec. Nous n’étions que trois dans la session. (Mais il semblerait que la session d’Afro-dance avec Zab Maboungou & Casimiro Nhussi était pleine à craquer!) Nous étions donc un très petit groupe dans la salle Incubation francophone, mais cela n’a pas posé problème, bien au contraire. Nous avons eu une session calme et très inspirante, puisque nous avons pris le temps pour apprendre à nous connaitre. De cette façon, c’était une session rafraichissante et légère comparée aux autres discussions auxquelles j’ai assisté lors de Primary Colours / Couleurs primaires. Ainsi, la seule participante à notre session nous a indiqué qu’elle travaillait au Conseil des Arts du Canada et nous a dit qu’elle voulait apprendre les différentes façons de raconter une histoire. Elle souhaitait découvrir toutes les différentes stratégies qu’adoptent les artistes pour (se) raconter.
J’ai aimé le fait que nous avions pu parler ensemble de nos différentes façons de procéder pour raconter des histoires. Monsieur Durand nous a beaucoup éclairées sur ses méthodes de travail en parlant de sa pratique d’art dramatique. Il a souvent mentionné le mot «Action», en expliquant comment un acte de transformation peut servir à dissimiler de l’information émotive dans une histoire. Il a parlé de l’importance du shamanisme, de la manière que ce type de manifestation spirituelle reste au cœur de sa pratique. L’artiste cherche toujours une voix authentique et originale qui lui appartient, mais qui peut aussi rejoindre les autres. C’est à ce moment que l’autre participante a mentionné qu’elle était aussi venue à notre session précisément parce qu’elle avait été présente à la soirée « Moving Images Showcase » où j’avais partagé un de mes films (negotiations II). Elle voulait en savoir plus sur mon processus créatif. Agréablement surprise, j’ai donc pris la parole afin d’expliquer comment j’aborde les thèmes de la nostalgie, de l’identité, de l’altérité et de la mémoire dans mes œuvres où sont mêlés souvenirs et rêves. J’utilise l’art visuel, un langage symbolique, pour explorer ces thèmes à la fois très personnels et universels. Je réarrange librement les images utilisées pour créer une nouvelle cosmogonie composée de différentes couches d’information. C’est donc une méthode différente de celle que nous avait présentée monsieur Durand.
Monsieur Durand a conclu la session en précisant qu’il faut parfois se perdre pour se (re)trouver et pour se découvrir... Nous étions tous d’accord qu’en tant qu’artistes, c’est notre rôle de raconter des histoires : nous devons poser des questions, creuser, approfondir, reformuler et présenter... En fin de compte, nous avons beaucoup appris lors de nos échanges.
Anna Binta Diallo est une artiste visuelle qui se penche sur la mémoire et la nostalgie pour créer des récits inattendus autour de l'identité. Née au Sénégal et élevée au Manitoba, elle vit actuellement à Montréal. Son travail a été exposé à la Maison des Artistes Francophones, à la Art Gallery of Southwestern Manitoba, à la Art Gallery of Alberta, au MOCA Tapei et a fait l'objet de nombreuses publications. En 2016, Diallo présente palimpseste au MAI(Montréal), une œuvre qui marie collages, peintures, gravures, dessins et installations audiovisuelles.